My scientist is (not) rich

My scientist is (not) rich

11 janvier 2012 0 Par Igor Babou

News de la recherche : nombreux sont maintenant les appels à communiquer pour des colloques organisés en France par des institutions françaises, mais qui sont rédigés uniquement en Anglais. Et ne parlons pas des appels d’offre européens : y écrire dans une autre langue que l’anglais de cuisine standard de la recherche y serait considéré comme une faute de goût.

Nous devenons une simple province de la recherche, à la langue presque honteuse, y compris pour ses propres pratiquants. Un jour on s’excusera d’oser encore parler français à l’université française, et les catégories et concepts qui vont avec notre langue disparaîtront dans le même mouvement de réduction de la diversité linguistique et culturelle que nous entretenons avec une passion masochiste évidente.

Paradoxe : dans la “France d’après”, on exige la maîtrise du français de la part des travailleurs immigrés, mais les classes privilégiées qui sont les nôtres s’accommodent de plus en plus d’un anglais hégémonique dont on n’interroge même plus les conséquences ni la signification. Nos collègues anglais et états-uniens n’en demandent sans doute pas tant, tout comme l’obscur département des sciences de l’éducation d’une université de Shanghai qui avait bidouillé un outil interne d’évaluation ne devait pas s’attendre à ce que l’ensemble de la planète ne l’érige en modèle total(itaire) d’évaluation de nos supposées excellences.

Le tropisme anglo-saxon nous prive pourtant de ressources bibliographiques importantes et d’ouvertures réflexives, interculturelles, comparatives et politiques qui nous manqueront à l’avenir : nous sommes devenus – ou en train de devenir – un pays périphérique (l’usage exclusif de l’anglais le montre assez), et l’expérience des penseurs de la science et des techniques dans les pays périphériques latino-américains, par exemple, aurait beaucoup à nous apprendre.

Le jour où nous n’aurons plus qu’une seule langue pour exprimer la dernière catégorie de pensée qui nous sera autorisée (“the excellence”, I guess) alors on n’aura plus guère que les yeux (ou plutôt l’œil unique du cyclope) pour pleurer notre diversité passée. N’avons nous donc rien appris ni retenu de l’anthropologie culturelle, ni de la sociologie des sciences, au sujet de la nature culturellement ancrée des savoirs ?

Well, ze chaud must go on…