Un week-end queer-féministe et anticapitaliste du 3 au 4 mai mais qui témoigne des incohérences du monde des activistes, des artistes, des académiques et des médias

Un week-end queer-féministe et anticapitaliste du 3 au 4 mai mais qui témoigne des incohérences du monde des activistes, des artistes, des académiques et des médias

3 mai 2025 0 Par Igor Babou

Je vais me faire le relai ici d’un appel du Laboratoire écologique zéro déchet au sujet de la Cité fertile de Pantin, et des événements qui s’y déroulent sous l’étiquette écologiste, anticapitaliste, queer, féministe, etc., et du problème de la cohérence (et des incohérences) des mondes de l’activisme, des artistes, des académiques et des médias « alter ».

Tout d’abord, je me permets de copier-coller ici le début de l’appel du LEO, qui peut être retrouvé intégralement à cette adresse : https://www.labozero.org/index.php/2025/05/03/ce-week-end/

Aujourd’hui a lieu un évènement anticapitaliste, écologique, anti fast-fashion et féministe, avec une entrée gratuite et une super programmation.

Et pourtant nous allons le fuir, pourquoi ?

Parce que que le collectif « les Murènes » pourtant radical et sans compromis, dont la démarche nous parle a choisi la Cité fertile pour leur évènement dont une partie des bénéfices iront à des collectifs/associations pro-Palestine.

(extraits de leur page Instagram)

 

Nous prenons cet évènement en exemple mais ce n’est pas la première fois que nous alertons les collectifs et associations militantes sur ce genre d’endroits. La cité fertile n’est qu’un exemple parmi d’autres de lieux à l’apparence « cool » ou « alternatif » mais qui abrite des financeurs plus que douteux et leur sert de faire valoir écologiques, solidaires, féministes… Ainsi nos luttes perdent de leurs sens et nous nous divisons : le lieu d’où l’on parle, l’origine de l’argent dont nous nous servons pèsent dans la crédibilité de nos propos. Nous ne pouvons pas combattre nos ennemis en leurs servant de caution.

Pour rappel la Cité Fertile c’est ça :

(extrait du site internet de la cité fertile, onglet Partenaires)

Mais la BNP, premier partenaire de ce lieu c’est ça :

« L’AFPS, Attac et la Campagne BDS France demandent aux banques françaises, en commençant par BNP Paribas, de cesser leur complicité dans le financement de la colonisation illégale de la Palestine, du maintien du régime d’apartheid, et du génocide à Gaza, de se conformer à leurs obligations en matière de devoir de vigilance, et de suivre la recommandation de désinvestissement de l’ONU. Désinvestir est possible, comme l’ont montré de nombreuses institutions financières de par le monde. » pour en savoir plus RDV sur le site d’ATTAC.

Je précise que le LEO, moi-même et quelques autres personnes avons pris la peine, il y a déjà plusieurs semaines, de contacter le collectif Les Murènes pour leur signaler l’ambiguïté du lieu où iels allaient organiser leur événement. Nous leurs avons envoyé tous les éléments leur permettant de prendre la mesure du greenwashing pratiqué depuis des années à la Cité fertile. Les Murènes on,t répondu qu’elles en discutaient au sein de leur collectuif, plus plus rien. On peut donc en conclure que leur événement, qui semble maintenu, se fera en toute connaissance de cause. Ce qui lui retire évidemment toute cohérence et toute légitimité du point de vue écologique et anti-capitaliste.

Ensuite, j’aimerais rappeler que ce n’est pas la première fois que le LEO et moi-même, ainsi que quelques autres, interpelons des collègues universitaires, mais aussi des artistes et des activistes, ou encore des médias, au sujet du greenwashing nauséabond de la Cité fertile, que nous appelons entre nous « la Cité fétide », ou « Disney palettes » en raison du faux semblant cool-alter-branché-palettes du lieu. En effet, en avril 2023, nous avions déjà fait paraitre une tribune sur Le média à propos d’un événement sur le thème de l’écologie populaire qui devait réunir intellectuels, activistes, et médias à la Cité fertile. L’appel en question est toujours en ligne à cette adresse : https://www.lemediatv.fr/articles/2023/pour-une-ecologie-populaire-appel-contre-les-faux-semblants-et-le-marketing-des-alternatives-ecologiques-uebN0Ej7TEmVWTPfpmLVpQ

Le fait que la Cité fertile apparaisse toujours comme un lieu propice à l’organisation d’événements écolo-militants est très préoccupant. L’absence de recul critique, parfois de bonne foi de nombreux intellectuels ou activistes, quand il s’agit de trouver une scène où s’exprimer, est également inquiétant, dans une période marquée par des formes de confusionnisme et de renversements de valeurs, où plus aucune aspiration à la vérité – ou du moins à la cohérence – ne semble guider les positions éthiques de collectifs pris – au sens « d’être pris » comme par un sortilège – par l’obsession de la visibilité, de la communication, du paraître à tout prix.

Une leçon également de cette complaisance commune des militants, activistes, intellectuels, institutions et médias à l’égard de lieux aussi peu ragoutants en matière de financement que la Cité fétide, c’est aussi de nous rappeler à nous, académiques, si prompts à dégainer une critique radicale à l’égard de nos propres lieux et pratiques et à les faire apparaître en contrepoint de celles des gentils activistes écolo-queer-féministes-alter-décoloniaux-etc., c’est que la radicalité est aussi un marché, et que sur ce marché particulier des postures radicales, il y a des positions à prendre, où les activistes écolo-queer-anticapitalistes-décoloniaux-féministes-alter,-etc. n’ont parfois rien à envier en matière d’incohérence, de naïveté et parfois de duplicité aux pires barbons surplombants de l’académisme bouffi de l’université et des institutions.